Projet en cours :

L’asthme est une maladie chronique des voies respiratoires affectant environ 235 millions d’individus selon l’Organisation Mondiale de la Santé et au niveau national, 8% des Canadiens en souffriraient. La forme sévère de la condition touche une minorité des patients (≈ 5-10%), mais elle engendre jusqu’à 50% des coûts de soins de santé reliés à cette maladie et est associée à une dégradation de la qualité de vie.¹

Un sous-groupe de patients asthmatiques particulièrement réfractaires aux traitements présente une inflammation neutrophilique; chez eux, les corticostéroïdes (le traitement usuel de l’asthme) sont souvent insuffisants pour corriger l’obstruction respiratoire et l’inflammation pulmonaire. Cette neutrophilie pulmonaire a été reliée à la progression de la maladie et à la présence d’altérations des structures bronchiques («le remodelage»).²

L’utilisation de macrolide, un antibiotique possédant des propriétés immunomodulatrices, a été associée à une amélioration de la qualité de vie et à une réduction du nombre d’exacerbations chez des patients asthmatiques.³ Les macrolides sont aussi particulièrement utiles dans d’autres maladies respiratoires chroniques médiées par une inflammation neutrophilique.⁴ De plus, des études en laboratoire et chez des modèles de rongeurs suggèrent que cette classe de médicament diminuerait le remodelage bronchique dans l’asthme.⁵

Le but de ce projet est donc d’élucider si l’administration de macrolide réduit le remodelage bronchique davantage que ce qui est obtenu avec les corticostéroïdes inhalés en utilisant le modèle d’asthme équin sévère. L’asthme équin et humain possèdent les mêmes caractéristiques fondamentales; une obstruction respiratoire, une accumulation de sécrétions, une inflammation pulmonaire (de type neutrophilique chez le cheval) et un remodelage bronchique chronique. Les changements structuraux se produisent particulièrement dans les petites voies respiratoires tant chez l’humain que chez le cheval asthmatique. Cependant, ces bronches ne sont pas aisément accessibles chez les individus asthmatiques, tandis qu’elles peuvent être prélevées séquentiellement chez le cheval, ce qui en fait un modèle idéal pour étudier le remodelage.

Pour répondre aux objectifs de ce projet, de multiples facettes seront étudiées, dont l’effet des macrolides sur la fonction respiratoire, sur l’inflammation pulmonaire, sur l’expression génique de multiples tissus et sur le remodelage bronchique.

En étudiant le potentiel thérapeutique des macrolides dans l’asthme, nous escomptons clarifier si l’usage de ces antibiotiques est éthiquement justifié. En effet, ils sont utilisés communément pour le traitement des patients asthmatiques sévères malgré les réserves concernant le développement d’antibiorésistance. Ainsi, si cette étude démontre une utilité clinique à leur administration, elle pourrait inciter le développement de macrolide sans effet antibactérien.

1. FitzGerald JM et al. Recognition and management of severe asthma: A Canadian Thoracic Society position statement. Canadian Journal of Respiratory, Critical Care, and Sleep Medicine 2017;1:199-221
2. Shaw DE et al. Association between neutrophilic airway inflammation and airflow limitation in adults with asthma. Chest 2007;132:1871-1875.
3. Gibson PG et al. Effect of azithromycin on asthma exacerbations and quality of life in adults with persistent uncontrolled asthma (AMAZES): a randomised, double-blind, placebo-controlled trial. Lancet 2017;390:659-668.
4. Kanoh S, Rubin BK. Mechanisms of action and clinical application of macrolides as immunomodulatory medications. Clin Microbiol Rev 2010;23:590-615.
5. Kang JY et al. Long-term azithromycin ameliorates not only airway inflammation but also remodeling in a murine model of chronic asthma. Pulm Pharmacol Ther 2016;36:37-45.

L’asthme sévère est un syndrome respiratoire chronique associé à une altération de la masse musculaire lisse des voies respiratoires et de la composition de la matrice extracellulaire. Les interactions qui se produisent entre la matrice extracellulaire et les cellules musculaires lisses bronchiques contribuent à ce remodelage et à la réponse limitée au traitement. Les matrices tridimensionnelles permettent de capturer la réponse cellulaire complexe des cellules des muscles lisses des voies respiratoires à la matrice extracellulaire bronchique. Nous avons établi un protocole pour décellulariser les bronches équines, puis les recellulariser avec des cellules musculaires lisses des voies aériennes primaires. Les résultats ont montré que les cellules musculaires lisses migraient dans la couche musculaire lisse décellularisée, suggérant qu’au-delà des facteurs mécaniques, l’échafaudage induisait un effet chimiotactique sur ces cellules.

Les interactions qui se produisent entre la matrice extracellulaire bronchique (ECM) et les cellules musculaires lisses (SMC) dans l’asthme contribuent au remodelage des voies respiratoires et à la réponse thérapeutique limitée. La culture cellulaire tridimensionnelle offre la possibilité d’étudier les interactions ECM-SMC dans un environnement presque naturel. En utilisant le protocole cité ci-dessus, nous visions à mélanger et faire correspondre différents contrôles et ECM asthmatique avec différents contrôles et SMC asthmatique. Nous avons ensuite utilisé les tissus résultants pour étudier l’influence de l’ECM sur le SMC et vice versa. Pour ce faire, nous avons utilisé l’histologie, la microscopie électronique à balayage sur la surface des tissus et les coupes transversales et le séquençage (« next gene sequencing ». Travail toujours en cours.

L’hypothèse de notre projet est que les bioactivateurs stimulés par le microenvironnement dans l’inflammation des voies respiratoires peuvent contribuer à une insensibilité des neutrophiles aux corticostéroïdes chez les chevaux asthmatiques.

La fonction neutrophile sera étudiée en comparant la viabilité, l’apoptose, le gène pro-inflammatoire et l’expression protéique des neutrophiles dans des conditions de culture simulant l’hypoxémie et le stress oxydatif.

L’administration intra-articulaire (IA) de corticostéroïdes est effectuée de routine en pratique équine. Les chevaux avec de piètres performances mais ne démontrant pas de problèmes orthopédiques pourraient s’améliorer avec ces traitements. Des travaux récents de notre laboratoire ont démontré une amélioration de la fonction pulmonaire des chevaux asthmatiques sévères après une injection intra-articulaire de triamcinolone acétonide (TA). Nous avons donc émis l’hypothèse que l’acétate de méthylprednisolone intra-articulaire (MPA), un autre corticostéroïde couramment utilisé, diminuerait également l’obstruction des voies respiratoires chez les chevaux asthmatiques sévères.

Lors d’études antérieures, nous avons démontré la présence d’angiogenèse dans les voies respiratoires centrales des chevaux asthmatiques. L’objectif de notre étude est d’évaluer la réponse angiogénique au traitement par corticostéroïdes. Notre hypothèse est que l’angiogenèse diminuera légèrement avec le traitement.

La forte prévalence de l’asthme chez les chevaux en fait l’une des principales raisons de consultation en médecine équine.

Étant donnée la vocation athlétique du cheval, toute atteinte du système respiratoire influence le potentiel sportif de l’animal. De ce fait, même la forme légère et modérée de l’asthme équin, dont la principale manifestation clinique se résume à une intolérance à l’effort, nécessite un traitemen

t adéquat basé sur un diagnostic précoce. Bien qu’un haut pourcentage d’équidés soient atteints par la forme légère à modérée (IAD), seule une certaine proportion de ceux-ci développera des symptômes progressant vers la forme sévère de l’asthme équin. Or, la pathophysiologie à l’origine de cette évolution demeure incertaine. Des études de notre laboratoire ont toutefois observé, chez des cas asthmatiques sévères, un changement du profil des protéines contractiles du muscle lisse bronchique, ainsi qu’une augmentation de la masse de ce muscle, accompagnée d’un renouvellement cellulaire plus rapide. À la lumière de ces résultats, nous avançons l’hypothèse que des changements phénotypiques du muscle lisse bronchique de certains chevaux asthmatiques légers et modérés prédisposeraient au développement de l’asthme équin sous sa forme plus sévère.

L’expression de l’isoforme rapide de la myosine, laquelle serait associée à un bronchospasme accéléré, sera comparée entre des chevaux asthmatiques (n=13) et des chevaux contrôles (n=9) par RT-qPCR à partir de l’ARN extrait de biopsies endobronchiques (EBB). Chez ces mêmes chevaux, des immunohistochimies (PCNA et TUNEL) seront réalisées sur des EBB afin d’évaluer le renouvellement des myocytes. Nous espérons observer des changements phénotypiques du muscle lisse bronchique chez des cas légers et modérés, comparables à ceux observables chez les asthmatiques sévères, permettant de mieux caractériser les différents stades formant le syndrome de l’asthme équin.